“Needy” est un mot très utilisé par la communauté de la séduction. Il décrit un homme qui a besoin de la femme qu’il désire séduire. Il entre alors dans une relation de dépendance avec elle: son bonheur ne dépend plus que d’elle.
Cela correspond à une vision de l’amour présente depuis très longtemps en philosophie, puisqu’on peut remonter à Platon et à son Banquet pour trouver la définition suivante de l’amour:
« Ce qu’on n’a pas, ce qu’on n’est pas, ce dont on manque, voilà les objets du désir et de l’amour. »
Le manque pousse souvent à la faute: le “needy” est trop pressant, il colle, il énerve. Il est une source de frustration pour la femme, et le pire dans tous ça, c’est qu’il n’est pas heureux et qu’il ne pourra jamais l’être!
En effet, selon Platon, il n’existe que deux options pour le “needy”: soit il est seul, et il souffre de son manque, soit il est en couple, mais puisqu’il a conquis l’objet de son désir, il n’est plus amoureux et donc non satisfait.
Pour Platon, il n’y a donc pas de couples ou de célibataires heureux, tous souffrent de la dictature du manque. Pas très joyeux, tout cela.
Heureusement, il existe une alternative en philosophie: Aristote, plus tard Spinoza
Aristote a effet dit “Aimer se réjouir”. Définition dont Spinoza s’inspirera pour dire « L’amour est une joie qu’accompagne l’idée d’une cause extérieure ». Ainsi, cette définition efface le problème de Platon. Etre amoureux n’est plus désirer une femme ou un homme qui nous manque, mais seulement se réjouir de son existence.
Le “je t’aime” de Spinoza n’exige donc rien, il évite ainsi le de désir de possession de l’être aimé, il évite le manque et permet le bonheur.
Le “needy” ne se réjouit jamais, il poursuit toujours son désir, sans jamais prendre le temps d’en apprécier l’objet. Comme dirait André Comte Sponville:
“Enfin qu’il n’est pas besoin de manquer de ses amis pour les aimer : la passion donne raison à Platon, presque toujours ; l’amitié, à Aristote et Spinoza, presque toujours. Or toute passion qui dure se transforme en amitié ou devient mortifère. La passion est du côté de la mort, montre Denis de Rougemont. L’amitié, du côté de la vie. Tant pis pour Platon. Tant mieux pour nous. On peut aimer ce qui manque, et souffrir. On peut aussi aimer ce qui ne nous manque pas, c’est-à-dire jouir ou se réjouir de ce qui est.”
L’amitié reste donc la valeur sûre, il permet à tous de comprendre ce qu’est l’amour selon Spinoza. On ne demande rien à un ami, on se réjouit facilement de son existence.
C’est sans doute une attitude plus difficile à avoir avec une femme: la passion interfère. Cependant, elle nous permet de prendre la nécessaire distance avec la femme que l’on désire ou que l’on aime: en ne faisant pas seulement un objet de désir mais aussi une possibilité de se réjouir.